Oeuvre
tridimensionnelle et espace public : Giuseppe Penone, L'Arbre des voyelles, en
collaboration avec Pascal Cribier, jardin des Tuileries, Paris, commande de
l'État, DAP, ministère de la Culture, 2000.
Moulage d'un chêne de 30 mètres déraciné, cette œuvre de
bronze, dont le titre peut évoquer un poème de Rimbaud, est emblématique de la
démarche de Giuseppe Penone : démarche qui met l'inerte en consonance avec
le vivant et donne matière sculpturale au temps. Ici, les cinq branches de
l'arbre couché témoignent d'un passé. De ce passé fixé par une empreinte
renaissent cinq vivants arbustes, cinq « voyelles », A-E-I-O-U, qui
sculptent lentement le présent au rythme des saisons.
Notions
spécifiques :
La commande, moulage et pratiques de la sculpture,
stratégie, relation à la nature, le temps / la durée, les matériaux,
Incitations et
propositions :
« Au contact »
Au contact du sol de chaque branche de sa sculpture Penone a
planté 5 arbres d’essences différentes
(frêne, if, chêne, peuplier, orme)
Moulage bronze, empreinte,
la trace, éterniser un instant :
« Donner permanence
à l’instant »
Les élèves seront
invités à réfléchir aux conséquences paradoxales de ce geste artistique qui
revient à sculpter l'action du temps à contretemps : à donner forme sculpturale
à un instant qui résiste au cours du temps : l’arbre est mort et devint
éternel grâce au bronze et au geste de Penone.
« L’éphémère
s’éternise… »
L’arbre est mort et devient éternel grâce au bronze et au geste de
Penone.
« Empreinte(s) »
ou « Paysage empreinté »
Penone garde la
trace de l’arbre grâce à la technique de l’empreinte, du moulage. Cette
technique permet de conserver une sorte de réalité de l’objet (son
double : identique au niveau de sa
forme mais différent par les matériaux employés)
« Répétez, c’est
nouveau ! »
En utilisant la technique de l’empreinte (moulage,
frottage…) montrer la différence dans la répétition.
« En passant dans le
jardin » ou « In situ »
Ce recours à la perfection mimétique (moulage) qui provoque le trouble et attise la curiosité pour
convoquer la méditation devrait conduire les élèves à s'interroger ce qui
peut se déduire du rapport de l’œuvre au site et au spectateur.
Penone interroge l’espace du jardin des Tuilerie, propose un
chaos végétal et sculptural dans un jardin à la française.
« Sculpter à contre
temps »
Nous retiendrons au
moins deux choses de ce geste inaugural : la première c'est que l'artiste fait
usage du moulage pour obtenir un double, une réplique en bronze qui, telle une
photographie, se saisit des états de l'instant où le temps fait surface.
Instant auquel le bronze donne permanence, pérennisant l'effet de l'étreinte
momentanée dans la durée. Les élèves seront invités à réfléchir aux
conséquences paradoxales de ce geste artistique qui revient à sculpter l'action
du temps à contretemps : à donner forme sculpturale à un instant qui résiste au
cours du temps.
« Toucher le
réel »
Les élèves seront
invités à remarquer qu'avant d'être une quête représentative (utiliser le
moulage = reproduire la réalité), une opération métaphorique ou symbolique, il
s'agit pour l'artiste de rendre visible ce qui ressortit aux qualités
intrinsèques du matériau, de la matière travaillée. Ce faisant, l’œuvre expose
non seulement le mode opératoire de son artifice, mais aussi le processus par
lequel celui-ci oeuvre en elle et les conséquences physiques et formelles du
geste artistique qui le sous tend. Autrement dit, l’œuvre est réceptacle des
réponses du réel à son incursion artistique.
« le trompe l’œil »
Penone
introduit le doute chez le spectateur en proposant le moulage de l’arbre. Il y
a un mimétisme parfait qui interroge le spectateur.
« La mémoire durable
de l’arbre »
L'arbre des voyelles
n'est pas imitation inerte, il est cause de forme. Formation lente et continue
où se sécrète la génération, où se commémore le cycle de la vie. Voyelles, les
cinq arbustes s'énoncent au présent dans le testament que leur croissance
sculpte. Monstre hybride du naturé et du naturant dont les chapiteaux romans ou
les jardins de la Renaissance nous ont appris la fréquentation, la sculpture
croissante et métamorphique des Tuileries nous convie aux réminiscences.
« Nature /
culture » ou « Naturel/ artificiel » ou « La nature
en jeu » ou « être d’esprit et de nature »
Penone oppose un matériau utilisé par l’homme (le bronze)
à la croissance du végétal. Le végétal grâce à sa lente croissance va englober
le moulage de bronze.
« La matière
contient l’idée »
De la tradition
sculpturale Penone retient une posture qui le conduità honorer la matière en
exhumant la forme qu'elle seule est susceptible de contenir ou de générer. Mais
sa quête est toute matérialiste. A l'ascèse des classiques qui situent l'idée
au-delà d'un monde sensible que l'art aurait mission de transcender, il
substitue celle d'un artiste à la recherche d'un principe immanent, sans
arrière-monde. Un « toujours déjà là » jusque là imperceptible dont il s'agit
de rendre tangible la découverte. Ainsi la poutre équarrie nous révèle-t-elle
en son principe, la mémoire enfouie de l'arborescence, l'âme de l'arbre, de cet
arbre là que le temps compté de l'industrie a recouvert d'une gangue d'oubli :
la forme utile de la poutre. Il n'est pas insignifiant que l'arbre, matière
vivante et toujours unique mais se prêtant à la confection d'objets industriels
et commerciaux identiques vienne s'imposer à un artiste qui tente de surmonter
l'inconsistance du présent en lui donnant couleur d'éternité. Ambition somme
toute « moderne » au sens baudelairien qui lui fera souhaiter que l'éphémère
s'éternisât.
« Modernité et
vanité » ou « Passé, présent
(futur) »
En « éternisant » un élément éphémère (l’arbre)
Penone parle de la mort et en même temps de la vanité de la vie.
« Echelle 1 :
grandeur nature»
Le moulage de l’arbre oblige Penone à exposer une œuvre à
l’échelle 1. Il s’agit du moulage d’un arbre, d’un élément naturel (grandeur
« nature »)
« Contraste
maximum »
Le bronze s’oppose au végétal, le naturel à l’artificiel,
l’éphémère à l’intemporel, l’inerte au vivant, l’horizontal à la verticale….
L’Arte Povera et plus particulièrement la sculpture de Penone joue sans cesse
des contrastes et des oppositions. Le questionnement naît souvent de ces
contraires.
« Faire et laisser
faire » ou « Le temps à
l’œuvre » ou « Regardez ne suffit pas ! » ou « Une
œuvre, ça s’entretient ! » ou « Achever sans finir »
Quand peut-on dire qu’une œuvre est terminée ? En
intégrant le végétal dans son œuvre Penone laisse la nature achever son œuvre.
En quelque sorte il délègue à la nature la responsabilité de terminer son
travail !
« on peut
faire les choses sans forcer » G. Penone.
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